Actualité
Marie-France Lalande, bénévole, conceptrice d'un outil de communication avec les yeux
Publié le 24 mars 2022
Portraits
En 2016, j’ai été foudroyée par le Syndrome rare de Guillain Barré. Cette maladie lèse la myéline du nerf et ne permet plus le transport de l’information aux muscles. Je comprenais tout mais ne parvenais pas à m’exprimer auprès des médecins et des infirmières.
La communication contre l'isolement
Grâce à la prise en charge des équipes médicales de l’hôpital de Carcassonne, en coopération avec les CHU de Montpellier, Toulouse et Paris, ses doigts ont recommencé à bouger au bout de deux mois et un an de rééducation acharnée lui a permis de recouvrer toutes ses facultés. "Au sortir de cette expérience, j'ai réalisé que c’est l'isolement dans lequel j'ai été plongée qui a été le plus difficile à vivre. Je pensais qu’il existait des outils pour les personnes dépourvues de mode de communication. Je n’ai trouvé que Kikoz qui nécessite de cligner sur les lettres d’un alphabet, un usage fastidieux pour les personnes fatigables. D’autres outils sont coûteux et les services hospitaliers n’en disposent pas. Il fallait en concevoir un !"
Motivée par son vécu initiatique, l’ex-patiente décide alors de venir en aide à ceux qui sont dans une situation de handicap lourd suite à un AVC ou une pathologie avancée (maladie de Charcot, Sclérose en plaques, Parkinson, Locked-In Syndrome…), en phase terminale ou en fin de vie.
Une innovation médaillée au Concours Lépine
La Carcassonnaise décide alors de créer l’outil de communication "Clin d’œil à la vie", un chevalet de carton facilement transportable. À l’exemple de Jean-Dominique Bauby, victime du Locked-in syndrome et auteur du livre autobiographique, Le Scaphandre et le Papillon, les seuls battements de paupières permettent l’expression du patient grâce à cet outil : un clignement des yeux signifie "oui", deux correspondent à "non", regard vers le haut ou vers le bas exprime "encore" ou "stop"... Près de 1000 mots sont possibles dans huit catégories (douleur, corps, objet, action, personne, sentiments, quand, autre chose). "La personne qui interroge le patient connait la catégorie en lui posant des questions fermées : Est-ce une douleur ? Une partie du corps ? Un objet ? Une fois le "oui" obtenu, on récite l'alphabet. Par exemple, on sait que le sujet porte sur un objet qui commence par "c", l'aidant propose alors "canne", "crème" ou "coussin"…"
Un kit complet pour patients, proches et professionnels.
Médaillé au Concours Lépine, au Festival Communication Santé, à l’École des Mines et Prodige de la République, "Clin d’œil" commence à se faire connaître grâce aux formations proposées par Marie-France. "Sous les regards appuyés du patient en détresse, le personnel soignant est souvent mal à l’aise. J'ai donc proposé une formation gratuite à l'hôpital de Carcassonne dans les services de soins intensifs et à la clinique en soins palliatifs. Quand ils savent se servir de l’outil, les professionnels se sentent beaucoup mieux ! Toutes les chambres de l’hôpital et de la clinique Montréal sont désormais équipées d’une icône sur l’écran du téléviseur pour découvrir l’outil à travers un tuto."
"Le patient "bâillonné" par sa pathologie a des choses à dire"
Déterminée à faire connaître l'outil, Marie-France propose un package complet : l’outil, le tuto, un guide et même une courte formation en e-learning. Le tout coûte entre 300 et 500 € selon le nombre de participants. Grâce à sa certification Qualiopi, le package est finançable par les fonds publics pour les établissements-employeurs. Soucieuse d'intégrer l'outil dans une démarche globale, la juriste en droit de la santé a également rédigé l'ouvrage de conseils pratiques Accompagner un patient très dépendant : conseils et bonnes pratiques, paru en mai 2021 aux éditions Chroniques Sociales.
Car il est essentiel que professionnels et proches entendent que le patient "bâillonné" par sa pathologie a des choses à dire. À nous de lui en donner les moyens…!
Vous souhaitez, vous aussi, vous engager, devenir bénévole et agir avec et pour les personnes en situation de handicap ?
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